Puisqu'il s'agit d'une montagne sacrée désormais et qu'on dispute sur la date de sa sacralisation -- certains la jugent récente, je la pense pour ma part protohistorique, mais qu'importe... Quelques vues de la belle et dangereuse séductrice.
Thursday, December 27, 2012
Chroniques de la fin du monde 5
Ah, que le pech de Bugarach est
beau au coucher du soleil ! Le monde continue, personne dans la région n’a
vraiment cru que la Terre s’arrêterait de tourner ni que ce coin de Razès
serait l’île épargnée dans un océan de destructions en tout genre. Des curieux
sont venus, surtout pour voir la horde de journalistes accourus du monde entier
pour couvrir un événement inexistant, la ruée attendue des survivalistes et des
sectes. Il y avait bien quelques ésotéristes et quelques figures du new age,
mais c’était la petite douzaine d’habitués de Rennes-le-Château et
Rennes-les-Bains, chercheurs de trésor ou de tombeau sacré, et les animateurs
de stages déjà bien implantés localement. Certains anciens comme Jean-Luc
Chaumeil revenaient sur leurs traces refroidies de longue date. S’agissait-il
de simple curiosité, s’agissait-il de profiter de la foule journalistique comme
d’un tremplin pour revenir sur le devant de la scène ? Ou simplement de passer un bon moment avec les
copains, ce qui était après tout ma propre motivation ? Et comme prêts à
défendre leur domaine contre sauvages et médiateux, on voyait aussi les
randonneurs Amis du Pic, en grand
uniforme.
Quelques uns avaient essayé de
transformer la chose en fête, en carnaval qui ne dirait pas son nom. On put
ainsi croiser de rares extraterrestres, la soucoupe volante du Père Noël dont
les rennes, ici, se transforment en villages et qui doit bien changer
d’équipage, une pin-up posant pour les calendriers de routiers, un James Bond
de hasard dont le smoking tranchait sur les dreadlocks des adeptes du
développement écologique et personnel. Mais la vraie manne, le vrai cadeau de
Noël maya fut pour les restaurateurs, ceux de Bugarach comme ceux des environs.
Trois centaines de journalistes, cela ne vit pas de l’air du temps !
Quant aux gendarmes, nerveux le
matin tant ils avaient été chauffés par les discours alarmistes de Fennech,
président de la Miviludes, ils étaient déjà largement hilares en fin
d’après-midi. Au moins, Fennech se sera-t-il ridiculisé à la face du monde et,
pour ma part, je m’en réjouis : la police de la pensée et des mœurs
d’inspiration rationaliste est aussi odieuse et insupportable que toute autre
inquisition. Et ce n’est pas Massimo Introvigne qui me contredira.
Reste à comprendre comment, d’une
simple discussion de bistro entre le maire de Bugarach (196 habitants) et un
journaliste de L’Indépendant,
quotidien local, rapportée en rigolant par ce dernier dans les colonnes de son
journal a pu d’une part faire fusionner deux lignées mythiques jusqu’ici
distinctes et, d’autre part, déclencher une telle agitation des médias et des
autorités. Ce n’est certes pas la première fois qu’on annonce une fin du monde
ni même la première fois que quelques journaux locaux reprennent la nouvelle
pour remplir leurs fins de pages. Les vrais cataclysmes, eux, ne frappent pas à
la porte avant d’entrer en action. Ils frappent, tout simplement. Quelque
chose, dans la mythologie en gésine autour de Rennes-le-Château, avait-il
préparé le terrain des croyances ? Il est vrai qu’on retrouve dans le
discours de Plantard et sa reprise par Gérard de Sède ou Henry Lincoln la
thématique du roi caché qui implique un renouvellement des temps après une
série de catastrophes mais, dans la saga du Grand Monarque, il s’agit de
guerres très humaines, de désastres politiques ou politico-religieux. Et cela
n’explique pas qu’on vienne du Japon, de Chine ou de Corée couvrir
l’inexistant.
Et le lendemain... A part un étrange soldat accompagné de son chien que filmaient de tout aussi étranges cinéastes, le seul évènement de Bugarach fut le trophée des chasseurs.
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