Monday, December 25, 2006

The times they are a-changing (4)


La lecture d’un article de Guy Millière dans Les 4 Vérités m’incite à rouvrir une série d’articles close depuis le mois d’août. Tant pis si mes réflexions s’entrelacent comme une broderie d’Irlande.

Extraits significatifs :

L’un des problèmes majeurs de la société française, peut-être le problème majeur, est l’inaptitude de ceux censés constituer ses élites à comprendre le monde tel qu’il devient. Dans nombre d’autres pays du monde, et en particulier dans ceux qui parlent anglais, on comprend que la mondialisation accélérée dans laquelle nous sommes est un fait et que ce fait doit être expliqué par les intellectuels et pris en compte par les hommes politiques.

Qu’est-ce qu’un fait ? Sous la plume de Millière, le devenir collectif semble avoir le caractère inéluctable du fatum antique. Mais la mondialisation accélérée est le fruit d’une convergence de volontés, une réalisation humaine adossée à une vision de l’économie qu’ont toujours défendue les théoriciens américains. L’Angleterre ne s’y est ralliée qu’assez tardivement. Et j’aimerais quand même mettre un bémol : la mondialisation n’empêche pas la plupart des circuits d’échange de rester régionaux ni les Etats-Unis de se protéger par les barrières douanières qu’ils essaient d’interdire aux autres.

Y eut-il dans le passé des époques sans échanges mondiaux ? A l’âge du bronze, c'est-à-dire dès que nous pouvons suivre les circuits économiques, nous voyons l’ambre de la Baltique rejoindre la Méditerranée et même l’Egypte ou, par d’autres voies, la Chine. Ce qui deviendra la Route de la soie s’esquisse par des caravanes régulières entre Chine, Inde, Mésopotamie et, par bateau, les produits d’orient atteignent les îles florissantes de la mer Egée. L’étain vient d’Ecosse, le cuivre de Chypre ou du Zagros. Comme par ailleurs il semble que les échanges entre la Chine et la côte ouest de l’Amérique n’aient jamais cessé malgré le réchauffement climatique interdisant de passer en traîneau le détroit de Béring, on peut déjà parler de mondialisation de l’économie. C’est ainsi qu’un peu plus tard les pharaons d’Egypte consommèrent du tabac comme le suggère l’analyse de la momie de Ramsès II, si ma mémoire est bonne[1]. Ce qui s’accélère aujourd’hui, ce n’est pas la croissance de l’espace géographique des échanges mais celle de leur volume et la vitesse des transports, dus aux progrès technologiques. Mais le fait de base, le commerce à longue distance, n’a pas fondamentalement changé.

On m’objectera, je l’entends d’ici, que l’augmentation quantitative de ces échanges entraîne un changement qualitatif. C’est fort possible. C’est même sans doute vrai. Mais il s’agit de changements culturels, civilisationnels. En dehors d’une analyse marxiste ou d’une idéologie de type école des Annales, on ne peut pas faire de l’économie la cause unique de telles mutations.

Mutation. Millière utilise ce terme pour qualifier le présent et, surtout, le futur proche.

Déchiffrer cette mutation n’est pas simple et implique de se défaire de nombres d’anciennes façons de penser. Ce qui change est non seulement la façon de produire, de vendre, de créer, d’échanger, de communiquer, ce sont aussi les rapports au travail, à l’économie, à l’entreprise, à la culture, les relations des êtres humains entre eux, les définitions et le statut de la matière, du vivant, des technologies.

Sur ce point, nous sommes en accord – à ceci près que je ne cesse pas de me souvenir que tout cela, ce sont des réalisations humaines et non des forces transcendantes.

Il existe sur la planète les lieux où tout cela est acquis et où l’on pense déjà aux prochains horizons. Il existe les lieux où tout cela est en voie d’acquisition. Il existe des lieux d’hostilité radicale où tout cela est refusé, rejeté de manière absolue. Et puis il existe les lieux comme la France où prédominent surtout la peur, l’incompréhension, un mélange de refus de voir et de certitudes anciennes trop ancrées et qui font obstacle. J’entends donner des moyens de surmonter la peur et d’ouvrir les yeux. J’entends dire que le choix est simple : ou bien nous regarderons l’avenir en face, ou bien l’avenir nous oubliera comme s’oublient les civilisations mortes dans la stérilité.

Même si la France disparaissait de la manière qu’il le suggère, on ne pourrait pas parler de « civilisation morte dans la stérilité » car toute son œuvre passée, tout son patrimoine témoignerait au contraire d’une culture féconde. Et s’il est vrai qu’en dehors de quelques polytechniciens abandonnant la science pour le grenouillage mi politique mi commercial, personne ne se précipite vers l’avenir tel que le prônent certains économistes anglo-saxons, ce n’est pas forcément par un mélange de peur et d’aveuglement ni parce que « le monde vu de France est le monde selon José Bové ». Puisque Millière crédite la gauche et, parmi elle, surtout les altermondialistes du désir de « réintroduire du politique dans l’économie », ce parti pris lui cache quelques évidences.

Tout d’abord, il oublie que le malthusianisme sous-jacent à la plupart de l’altermondialisme est d’origine anglo-saxonne autant que les théories libre-échangistes, que ce sont les deux faces d’un même sou, le frein et l’accélérateur d’un même véhicule. La tradition française n’est pas malthusienne, ce qui d’ailleurs explique le faible impact électoral des Verts et l’absence presque totale dans notre paysage politique de contestation écologiste musclée, un brin terroriste, comme il en existe dans les pays anglo-saxons. Il oublie également que l’imaginaire politique traditionnel en France n’a jamais rompu avec la trifonctionnalité que Dumézil pensait indoeuropéenne mais dont l’expression la plus parfaite se trouve chez Raoul Glaber. La révolution française, aussi convulsive qu’elle ait été, n’a fait que déplacer les trois ordres sans les abolir, les universitaires puis aujourd’hui les médias prenant la place des prêtres et les politiciens celle des chefs, c'est-à-dire les deux visages de la première fonction[2] ; la seconde[3] restant incarnée par l’armée, la police et les pompiers ; la production industrielle et le commerce remplaçant les paysans dans la troisième. Et les métaphores guerrières utilisées dans le monde économique n’y changent rien, sauf à suggérer que les multinationales ou les grosses entreprises sont des tribus à part entière portant en elles les trois fonctions de manière transversale ou fractale.

Le problème de la France, de son imaginaire collectif, c’est surtout le vide de plus en plus sensible des deux premières fonctions : politiciens corrompus, intellectuels de la pensée unique, médias englués dans la propagande laquelle ne cesse de dévaloriser l’armée tout en applaudissant à certaines aventures lointaines, police muselée face aux mafias des cités. Des théoriciens qui proposent la libéralisation économique comme remède à tous les maux apparaîtront toujours à cet inconscient collectif comme des usurpateurs, comme la troisième fonction cherchant à s’approprier la « sur-fonction » régalienne.

Josick Croyal m’envoie le texte du commentaire qu’il va poster en réponse à ce texte de Millière. J’en reprends un extrait qui ne manque pas d’intérêt.

En l'état, la meilleure action consiste à contribuer un tant soit peu à priver de revenu l'Etat devenu parasite. C'est l'essence de l'esprit agricole, telle une politique de la terre brûlée, face à la pastoralisation du monde. Ainsi le premier agriculteur, premier résistant, qui castre le reproducteur du troupeau, neutralise son remplaçant en l'appareillant avec le premier. Ainsi, l'attelage de deux boeufs sous le joug retournant la sacro-sainte prairie. Ce sera toujours cela de moins pour l'Etat pastoral.

C’est bien la première fois que je vois comparer l’impôt à la razzia des éleveurs nomades sur les champs des agriculteurs. On pourrait tout de même objecter que les nomades qui prélèvent du butin ne donnent rien en échange alors que l’impôt permet d’entretenir les routes, les chemins de fer, les écoles, les hôpitaux, l’armée, la police, etc. Que certains pensent que les entrepreneurs privés s’en tireraient mieux, c’est leur droit le plus strict. Mais si nous en revenons aux structures profondes de l’imaginaire collectif, il nous faut constater que les services qui dépendent de l’Etat et donc des impôts sont les tâches traditionnellement imparties aux représentants de la première et de la deuxième fonctions. C’était au seigneur local d’entretenir les routes et d’assurer le maintien de l’ordre ainsi que la justice, aux clercs d’assurer l’éducation, le soin hospitalier et la solidarité, la cour royale servant de cour d’appel et d’instance de régulation.

Or la trifonctionnalité n’a pu s’instaurer que par une sorte de fusion des pasteurs nomades razzieurs, ancêtres des guerriers, et des agriculteurs, pères de la troisième fonction, sous l’égide de garants à la fois des serments humains et des serments réciproques des dieux et des hommes. C'est-à-dire lorsque le religieux se détache peu ou prou du magique, lorsque le chaman se transforme en sacrificateur qui offre à la fois les plus belles têtes du troupeau et les prémices des récoltes.

Chez Millière comme chez Croyal, il semble que la mutation actuelle tende à résorber définitivement la première et la seconde fonction, chaque individu devenant au moins idéalement prêtre, guerrier et producteur. Cet imaginaire est sans doute aussi profond historiquement que la trifonctionnalité. C’est en Irlande Lug « polytechnicien » en opposition au système druidique. C’est la société odinique où les Ases et les Vanes cohabitent dans Midgard après s’être longtemps combattus, où la Rigsthula distingue encore trois castes mais, si Thrœll appartient seulement à la troisième fonction, Karl unit en lui la troisième et la seconde tandis que Jarl est la synthèse des trois[4].

Or nous sommes au seuil d’un saut civilisationnel aussi important que la « révolution néolithique », beaucoup plus que la « révolution industrielle » qui n’avait pas changé grand-chose ni dans les rapports humains ni dans les rapports à la matière et à la vie, pour reprendre les termes de Millière. La connaissance du code génétique et les nanotechnologies permettent de passer d’une économie de transformation à une économie de création. Certes, les matériaux qui serviront à fabriquer les objets du futur ne surgiront pas du néant mais la réorganisation atomique permet d’obtenir des molécules qui n’existent pas à l’état naturel[5] ; à terme, c’est la fin de la prédation minière telle que nous la connaissons depuis la nuit des temps. Comme dans la symbolique alchimique, le matériau le plus commun et le plus vil pourra devenir merveille… ou poison sans remède.

Même les libertariens et les transhumanistes, deux mouvements qui partagent au fond le même substrat philosophique, la même revendication adolescente de liberté individuelle absolue[6], sont encore largement héritiers des mémoires, des légendes et des rêves nés avec le néolithique. Une économie de création suppose à la fois de l’audace et un sens aigu de la responsabilité, plus exactement un sens aigu de l’irréversible. Les OGM, pour ne prendre que cet exemple, ne feraient pas tant crier si leur mise en œuvre à l’échelle industrielle ne se faisait pas avant d’avoir toute la connaissance nécessaire, alors qu’on sait bien que l’on introduit des mutations irréversibles ou, du moins, difficilement éradicables si elles se révèlent plus néfastes qu’utiles. Je conseille aux chantres de l’avenir conçu comme un vaste jeu vidéo ou comme un fatum de méditer le roman de SF génial de Neal Stephenson, L’âge de diamant.

La liberté, si rien ni personne ne la garantit, ne tarde pas à se transformer en loi de la jungle[7]. Admettons même que chacun soit armé pour sa défense comme le propose les libertariens : que vaut la pétoire personnelle contre les bombes intelligentes lâchées d’un B2 furtif qui vole hors d’atteinte de la DCA ? On l’a vu en Bosnie, en Serbie, en Irak. Et que vaut le consentement dans le monde du travail si le choix n’est laissé qu’entre trimer pour très peu sans égard au potentiel de chacun mais selon les besoins des actionnaires spéculateurs et se retrouver sur le pavé ? Quel consentement peut avoir le pot de terre face au pot de fer ?

Dans L’âge de diamant, face aux pouvoirs somptueusement totalitaires du néo-tribalisme, c’est la mise en place d’une régulation par des formes de contre-pouvoirs qui résoudra la crise.



[1] Pour la présence de tabac, j’en suis sûre. C’est sur le nom du pharaon ausculté que j’hésite.

[2] Dumézil parle d’une fonction de souveraineté mais les exemples qu’il en donne, pris dans la mythologie indienne, Varuna et Mitra, représentent : Varuna, un dieu de l’orage ou plutôt de la mousson, par métaphore une puissance incontrôlable et destructrice mais promesse d’abondance par le retour de la vie après la sécheresse ; Mitra le gardien des serments et des contrats, gage de leur inviolabilité. Nous sommes très loin de l’image de la souveraineté en tant que légitimité du pouvoir et surtout pas du pouvoir absolu. Rappelons qu’au dessus des 3 fonctions et comme à leur synthèse se tient le roi, c'est-à-dire le régulateur.

[3] La fonction guerrière, offensive et défensive.

[4] La Rigsthula mériterait un commentaire plus détaillé. Notons toutefois que le dieu Tyr, lorsqu’il descend pour s’unir aux mortels, n’omet aucune des castes. Son parcours ressemble à une ascension sociale, du pauvre vers le riche mais aussi de l’irresponsable vers le pleinement responsable. Thrœll, l’esclave, du fond de sa pauvreté offre au Visiteur ce qu’il a de meilleur et qui ne représente sans doute pas son ordinaire. Il possède peu, il ne sait pas fermer sa porte, ce qui signifie que tout rentre en lui et que c’est d’abord des pensées et envies éclatées de l’instant qu’il est esclave, de son ignorance et de son insensibilité, mais il a déjà le sens de l’hospitalité et de la générosité. Dans l’apologue de Péguy, ce serait celui qui, sans autre perspective, taille la pierre. Karl, paysan libre, a plus d’aisance, plus de savoir-faire et de sociabilité (ses fils se nomment Voisin, Bon camarade, etc.) mais son horizon ne dépasse pas sa famille et son village. S’il prend les armes, c’est pour les défendre. C’est celui, chez Péguy, qui sur le chantier gagne sa vie et celle des siens. Jarl enfin, outre la richesse, s’est éveillé à la connaissance (il sait lire) et au sens esthétique (ses vêtements sont amidonnés et repassés), capable d’avoir un projet sur le long terme (son fils se nomme Héritier). Lui peut avoir conscience de bâtir une cathédrale. Mais tous, répétons le, sont capables de s’ouvrir à la visite du dieu et d’en recevoir une fécondité. S’appuyer sur ce texte pour rejeter des hommes hors de l’humanité serait un contresens absolu.

[5] Comme par exemple les fullerènes.

[6] « Ce n'est pas très difficile de présenter la litanie des libertariens : c'est-à-dire l'ensemble des principes moraux, politiques et économiques qui caractérisent ce courant de pensée, car cet ensemble repose sur une prémisse très simple : la revendication radicale de la libre disposition de leur corps ou de leur propre personne. Il revendique ce que l'on appelle le "self ownership" ou la propriété de soi. Ni Dieu, ni Maître. De celle-ci on déduit une philosophie politique, une épistémologie, une éthique et une économie politique qui caractérisent si bien la façon de penser des libertariens. » écrit Bertrand Lemennicier sur son site http://lemennicier.bwm-mediasoft.com dans l’article intitulé « Libertarien ».

[7] De la jungle humaine s’entend car la régulation des sociétés animales est beaucoup plus contraignante pour l’individu.

Saturday, December 23, 2006

Un appel de Jean Pierre Petit aux présidentiables sur la Z machine

A l'attention des scientifiques oeuvrant au sein des équipes soutenant les candidats à l'élection présidentielle de 2007 :Pour un nucléaire sans radioactivité ni pollution !

8 décembre 2007
Par Jean-Pierre Petit, ancien directeur de recherche au Cnrs, Astrophysicien et physicien, spécialiste en magnétohydrodynamique ( MHD )
jppetit1937@yahoo.fr

La gestion de l'énergie, au niveau national et planétaire, est un thème important de la politique de tous les états. Nicolas Hulot se positionne comme " fer de lance " de cette action de sensibilisation écologique en insistant sur une évolution climatique qui semble bien se dessiner et s'accélérer. Ce discours renvoie immédiatement aux modes de production de l'énergie. J'ai lu son ouvrage. Malheureureusement, en dehors de prôner une politique d'économie, de lutte contre le gaspillage, "d'austérité énergétique" on ne trouve dans les quelques pages qu'il consacre au sujet, en matière de formules alternatives, que les classiques recours à l'éolien et au solaire. Nicolas Hulot est parfaitement conscient, ce faisant, du fait que ces solutions alternatives sont à la fois très coûteuses et relativement peu efficaces, en comparaison du prix du kilowatt-heure issu d'une production pétrolière. Un coût par ailleurs brut, calculé sans se soucier des retombées, de la dépollution afférante. Je pense que notre pays devrait créer un pôle de recherche sur toutes les nouvelles formules pour produire de l'énergie. Ce genre d'activité mériterait une section du ministère de la recherche et de la technologie. Dans cette optique je voudrais pouvoir exposer à des militants compétents les possibilités offertes par la fusion a-neutronique, ou faiblement neutronique. Je m'explique. Pour tout un chacun, la fusion c'est exclusivement celle du mélange des deux isotopes lourds de l'hydrogène : le deutérium et le tritium, qui produit des neutrons, lesquels "activent les structures environnantes". Le professeur Gilles de Genne a pour sa part fortement mis en doute le fait que le système supraconducteur assurant la magnétisation, dans Iter, puisse résister aux effets d'un bombardement neutronique imparable. Il y a cela, plus le refroidissement du plasma par arrachement de noyaux lourds à la paroi, etc... On sait de longue date qu'il existe des réactions de fusion qui ne génèrent pas de neutrons, telles la réaction Lithium7 + hydrogène H1, donnant deux noyaux d'hélium, ou Bore11 plus hydrogèneH1 donnant trois noyaux d'hélium. La première s'amorce à une température de 500 millions de degrés, la seconde à un milliard de degrés. Cette seconde filière n'avait jamais été envisagées jusqu'à ce jour, du fait de la température qu'on doit créer, qui semblait relever de la ... science-fiction. La filière Lithium hydrogène est utilisée depuis les années cinquante dans ... les bombes à hydrogène. Au coeur d'une explosion thermonucléaire règne donc une température de l'ordre de 500 millions de degrés. C'est aussi la température d'ignition de la réaction, qui est obtenue en focalisant le flux de rayons X produit par une bombe A, faisant office d'allumette, de détonateur. Mais on est loin, ici, d'applications industrielles. La réaction deutérium tritium s'amorce à 100 millions de degrés. C'est ce qui a été obtenu pendant quelques secondes dans le Tokamak anglais de Culham, ce résultat servant de point d'appui au dispendieux et très problématique projet Iter. Avec une telle formule il serait totalement exclu d'envisager ce type de fonctionnement en continu, à la manière d'une chaudière, aux température requises pour les filières Li- H et B-H ( respectivement 500 millions et un milliard de degrés )
Il faudrait opter pour un fonctionnement impulsionnel.
Or ce passage du fonctionnement continu au fonctionnement impulsionnel a déjà été opéré avec succès dans notre technologie et s'est avéré si efficace que l'ancienne formule a aussitôt été abandonnée. Ca n'est autre que cette mutation technologique qui a fait passer l'humanité du stade de la machine à vapeur à celui du moteur à explosion. C'est donc dans la logique technico-scientifique. Et si je devais qualifier le projet Iter de manière critique, outre tous les problèmes technico-scientifiques non résolus qu'il charrie, c'est d'être " la machine à vapeur du troisième millénaire ". Il serait beaucoup plus profitable et logique de pouvoir envisager un fonctionnement du style "moteur à explosion", avec des excursions en température plus importantes, qui permettraient d'opter pour des réactions de fusion non-polluantes et pratiquement exempte de radioactivité, comme celles évoquées plus haut ;
un nucléaire sans radioactivité ni pollution !
Les spécialistes qui se sont penchés sur cette questions concluent tous que la meilleure réaction serait la réaction bore-hydrogène. Si cette réaction est totalement a-neutronique, il existe des réaction parasites afférentes qui produisent quand même des neutrons, et il en est de même pour la réaction lithium-hydrogène. Mais cette production est beaucoup moins importante que dans la filière deutérium-tritium. En comparaison, elle est infime. On peut la qualifier de "quasi-aneutronique".
On voit donc poindre une nouvelle formule : celle d'une générateur à fusion, impulsionnel.
1 - On comprime un mélange Bore hydrogène- Des réactions de fusion dégagent de l'énergie- Il se crée un plasma sous très forte température, qui entre en expansion 2 - Cette expansion est opérée dans un champ magnétique, en régime de nombre de Reynolds magnétique élevé (où le plasma et le champ magnétique sont très liés l'un à l'autre ). "Le champ magnétique est comprimé"3 .- Ceci se traduit par la naissance d'un courant induit, et une production d'énergie qui, modulo un simple transformateur permet de l'extraire par "conversion MHD directe" et de l'exploiter sur un réseau. Ce système a été expérimenté par les Russes ( équipe d'Andréi Sakharov ) dès les années cinquante. Le rendement est très bon.4 - Il faut stocker dans l'équivalent d'un "volant" ( celui du moteur à explosion ) une partie de l'énergie, qui servira à assurer la compression de la charge de fusion suivante. Le qualificatif analogique le plus proche serait
un "diesel à fusion"
Voilà le schéma de principe, connu de longue date. Le compresseur est de type MHD. Cela signifie qu'on injecte un très fort courant électrique, de plusieurs dizaines de millions d'ampères dans un système, également connu de longue date, qu'on appelle un "liner", qui tend à imploser selon son axe sous l'action des forces de Laplace. Pourrait-on parvenir à atteindre une témpérature d'un milliard de degrés avec un tel système ? La réponse positive a été apportée par une équipe américaine en 2005, travail publié en février 2006 par le professeur Haines, directeur du laboratoire de physique des plasmas de l'Imperial College de Cambridge. Ce résultat était .. inattendu.
http://www.jp-petit.com/science/Z-machine/papier_Haines/papier_Haines.htm
Au laboratoire Sandia, Nouveau Mexique, les élèves de Gérold Yonas, pionnier dans les années soixante dix en matière de hautes puissances électriques pulsées, ont construit ce qu'on appelle une " Z-machine"Pourquoi ce nom ? Parce qu'on comprime un plasma "selon l'axe OZ". Le schéma est d'une simplicité absolue. On fait passer plusieurs dizaines de millions d'ampères dans un ensemble conducteur de forme cylindrique (selon les génératrices du cylindre). Cette puissance doit être injectée pendant un temps inférieur au temps d'implosion, de l'ordre de 100 nanosecondes. Mais cette technique, maîtrisée de longue date, ne pose aucun problème. Cette nappe de courant crée un champ magnétique. La combinaison du courant éléctrique I et du champ magnétique B donne des forces de Laplace dirigées selon l'axe, qui tendent à faire se précipiter les atomes du métal constituant ce "liner" vers l'axe.
http://www.jp-petit.com/science/Z-machine/z_machine2.htm
C'est là qu'interviennent les terribles instabilités MHD. Si le liner est un simple cylindre ( de cuivre ou d'aluminium ) il est impossible de maintenir la régularité de la nappe de courant. Au résultat, ça n'est plus un cylindre de plasma qui implose, mais un objet de plus en plus distordu, gauchi, en proie aux "contorsions" dues à la naissances de ces instabilités magnétohydrodynamique (dont je suis spécialiste). Tout cela est connu et a été mis en évidence expérimentalement depuis les années soixante dix, et même avant. Si l'implosion n'est pas régulière, la montée en température s'en ressent bien évidemment. L'équipe de Yonas, conduite par Chris Deeney, avait donc abandonné l'idée de découvrir là une filière alternative pour la fusion. Les températures visées étaient plus modestes : entre un et dix millions de degrés seulement. La Z-machine américaine était donc conçue comme un puissant générateur de rayons X, destiné à vérifier l'efficacité du durcissement de têtes nucléaires. Jusqu'à ce que survienne un évènement totalement imprévu. Pour essayer de conserve l'axisymétrie du liner le plus longtemps possible l'équipe de Chris Deeney imagina de remplacer le cylindre de cuivre par un ensemble de 240 fils en inox, d'un diamètre de l'ordre du micron. Pour fixer les idées un tel "liner à fils" fait 8 cm de diamètre et cinq de haut. Dans les expériences menées en 2005 l'intensité totale injectée était de 18 millions d'ampères et le temps de décharge de 100 nanosecondes. A la surprise générale, les fils de métal ne se sont pas instantanément volatilisés mais se sont au contraire sublimés "relativement lentement" ( ce "relativement lentement" se chiffrant en dizaines de nanosecondes ). Le liner a pu ainsi être transformé en un cordon de plasma extrêmement chaud, d'un millimètre et demi de diamètre. Tout cela a été mesuré. Une mesure de température, fiable, a également été effectuée, en se fondant sur le phénomène d'élargissement des raies par effet Doppler. Les résultats, parfaitement reproductibles, ont plongé les expérimentateurs dans la stupeur et l'incrédulité.
Température atteinte : 3,7 milliards de degrés !
C'est donc 3,7 fois la température d'ignition du mélange Bore-hydrogène ( un milliard de degrés ), 7 fois celle qui règne au coeur des bombes à hydrogène ( 20 500 millions de degrés ), 37 fois celle visée par Iter ( 100 millions de degrés ), 180 fois celle qui règne au coeur du soleil ( 20 millions de degrés ). Les Américains mettront en batterie en 2007 un nouvel appareil, nommé ZR, où les intensités électriques atteindront dès le premier tir 27 millions d'ampères. Le défi technico-scientifique est considérable. En effet rien ne s'oppose à ce que des températures encore plus élevées puissent être atteintes avec ce type de machine. Il n'est pas impossible que des machines de ce genre, où les températures finales croissent comme le carré de l'intensité électrique injectée, puissent atteindre un jour celles qui règnent au coeur des supernovae : 1000 milliards de degrés. La percée réalisé par les laboratoires Sandia ouvre donc la possibilité de déboucher sur des systèmes produisant de l'énergie " par fusion pure ", qui ont évidemment au premier chef des applications militaires à travers des nouvelles bombes à fusion n'ayant pas besoin d'un détonateur à fission, d'une "bombe A" pour amorcer les réactions. . Une technologie terriblement "proliférante". Les Américains, les Russes et différents autres pays travaillent activement sur cette nouvelle génération de ... bombes propres ! Des bombes, non seulement miniaturisables ( les fameux "mini-nukes" ) mais également "furtives", sans "signature nucléaires". D'où un intérêt forcené au plan stratégique. Comment produire les fortes intensités électriques requises ? Réponse : avec des explosifs, selon des techniques initiées par les Russes dès les années cinquante. J'ai donné depuis février 2006 force explications à ce sujet dans mon site et je serais prêt à reprendre toutes ces questions avec des gens de votre équipe pour la présidentielle 2007, suffisamment compétents pour que se noue un dialogue. J'ai également dialogué avec des gens ayant une grande expérience en matière de fusion (des ... anciens des bombes ). Un programme de recherche a été construit, budgeté à hauteur de ... 50 millions d'euros. En effet ces recherches, en comparaison des projets pharaoniques que sont Iter et Mégajoule s'avèrent incroyablement bon marché ( 200 fois moins chères que le projet Iter ). Autour d'une " Z - machine française " il faudrait rassembler 50 personnes, physiciens, ingénieurs, techniciens. C'est au-delà d'une recherche de type universitaire mais très en deçà de la moindre dépense militaire ou de la grande industrie. Au passage, pour des raisons que je pourrais détailler face à de bons physiciens, ce projet représente une porte ouverte vers des recherches en physique fondamentale qui représentent une voie jusqu'ici totalement inconnue : celle de plasmas bitempératures, hors d'équilibre, où la température ionique est cent fois supérieure à celle des électrons ! Ces recherches représentent un vaste bouquet de ... thèses de doctorat. Il est impossible, au-delà des applications de production d'énergie électrique, que de telles recherches sur les milieux hyperdenses et hyperchauds ne soient pas riches de retombées variées. Le simple souci de lancer en France des recherches fondamentales en physique de pointe, novatrices, justifierait le montage d'un tel projet, qui devrait immédiatement prendre une envergure une échelle européenne et même internationale ( dans le cadre d'une action plus générale, touchant à toutes les technologies alternatives, qui pourrait s'inscrire dans un projet planétaire : "énergie sans frontières" ) . En aucun cas cela ne serait de l'argent perdu puisque les Français seraient au minimum assurés de retrouver les résultats américains. Précisons au passage que les Français disposent de toutes les compétences requises pour donner corps très rapidement à un tel projet. La France possède sa propre " Z-machine" ( militaire, située à Gramat, dans le Lot). Mais celle-ci est trop peu puissante pour obtenir une percée comparable à celle opérée par l'équipe de Deeney ( la machine française produit 4 millions d'ampères contre 18 pour celle du laboratoire Sandia ). Mes efforts de sensibilisation, sur dix mois, ont commencé à provoquer un début d'écho... chez les militaires français, qui se moquent évidemment éperdument de la production d'électricité. Une réunion a été prévue au SGDN ( Service général de la défense nationale ). La préoccupation de l'armée serait alors de classer au plus vite de telles recherches sous le sceau du secret défense, étant donnée l'évidente possibilité d'émergence de technologies "proliférantes". De par les derniers échos que j'ai, la politique serait " plutôt que de risquer de voir se développer, via des applications civiles, des technologies sensibles proliférantes mieux vaut... ne rien faire du tout".
C'est le "attendons de voir", français, classique. Comme il y a 25 ans en MHD
Selon moi, en se polarisant sur les applications et les risques d'ordre stratégiques on est simplement... hors sujet. Un pays qui opterait pour le développement intensif d'armes thermonucléaires à fusion pure, sous le couvert du secret défense, au lieu de se poser en leader en matière d'investigations sur de nouvelles filières de production d'énergie électrique, ne ferait que rejoindre la vaste imbécilité planétaire. Un projet de Z-machine à visées civiles est non seulement envisageable mais urgent. Cela ne veut pas dire que le deux-temps à fusion soit immédiatement à portée de main. Il reste un certain chemin à faire, ne serait-ce que pour permettre à des réactions de fusion de démarrer et de s'entretenir après que cette température d'ignition ait été atteinte ( conditions de Lawson pour ce type de confinement, inertiel ). Si les Français démarraient un tel projet, celui-ci devrait en même temps faire école dans les différents pays européens, et même dans tous les pays du monde avec une conjugaison des compétences et un partage du savoir, sans restriction, dans une optique :
Energie sans Frontières
De plus il est difficilement envisageable de laisser des pays comme les USA ( et la Russie, la Chine, très avancés en matière de MHD ) se lancer seuls dans cette nouvelle voie, dans une optique hélas orientée vers la production de nouvelles armes, sans qu'aucun pays ne réagisse. Actuellement, les lobby Iter et Mégajoule voient d'un très mauvais oeil l'émergence possible d'une telle filière "outsider". Ils exercent une pression, visiblement efficace, sur les médias scientifiques et même sur des groupes de scientifiques pour que cette question soit passée sous silence. Ce phénomène ne concerne pas seulement la France mais tous les pays concernés par le projet Iter, et ils sont nombreux.
8 décembre 2006
Jean-Pierre Petit, ancien directeur de recherche au Cnrs, physicien, astrophysicien, spécialiste de MHD adresse électronique : jppetit1937@yahoo.fhttp://www.jp-petit.com
http://www.jp-petit.com/science/Z-machine/lettre_ouverte_politiques.html
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Conseils régionaux : http://www.conseil-general.com/

Remarque désabusée :
Cette percée scientifique majeure, et totalement inattendue, n'a fait la une d'aucun média scientifique, ou d'un média tout court depuis dix mois, y compris dans le pays même où elle a été effectée :: les Etats-Unis. Ni la célèbre revue Scientific American, aux USA, ni en Angleterre la revue Nature, n'ont pas fait leur couverture avec cette nouvelle, publiée en février 2006 par Malcom Haines dans la revue Moderne Physics Letters. En conséquence les médias des autres pays se sont dits : "si ces revues ne donnent pas un large écho à cette affaire, c'est qu'elle ne doit pas être si importante que cela. ou pire : douteuse. Constatons qu'elle n'a d'ailleurs pas eu de suite. Deeney, Haines et les autres se sont peut être ... trompés, qui sait ?". Attendons de voir comment les choses tournent ....
La vérité est toute autre et porte un nom : désinformation. Les implications militaires d'une telle découverte, à savoir la "fusion pure" sont considérables avec un corollaire évidement préoccupant : le caractère hautement proliférant de cette nouvelle technologie, le fait qu'il ne soit pas indispensable de se doter oréalablement d'armes à fission, d'uranium enrichi pour se doter d'armes de destruction massive. La question qu'on peut se poser, en fait, est "pourquoi ces résultats ont-ils été publiés et non immédiatement couverts par le secret défense le plus épais ? ". Comment imaginer qu'une telle percée ( plus de trois milliards et demi de degrés ! ) ne semble faire l'objet d'aucune suite sur le plan scientifique ?
Il y a deux explications. Les Etats-Unis travaillent d'arrache-pied sur ce nouvelles armes à fusion pure, exemptes de "signature nucléaire", qu'il serait donc possible de faire passer, sur le champ de bataille pour des armes conventionnelle. Un second aspect est le caractère miniaturisable de telles armes, avec comme corrolaire le fait qu'elles pourraient être utilisées massivement, par exemple en étant déversées à partir de l'espace, sans provoquer d'hiver nucléaire. L'avantage stratégique visé est considérable et ne peut se jouer que dans une ambiance de secret et de désiformation. Quand on met la main sur ne mine d'or on ne s'empresse pas de le crier sur tous les toits Au contraire on : fait de son mieux pour minimiser l'ampleur de la découverte.
L'absence d'écho, en France, découle de multiples facteurs. Il y a d'abord la formidable pression exercée par les lobbies Iter et Mégajoule, simple systèmes de traitement du chômage dans les régions, pour qui ces techniques outsider représentent un péril mortel. La seconde barrière est celle de l'incompétence, qui empêcha les Français de réaliser, au milieu des années soixante-dix l'importance cruciale de de la MHD, frein qui reste toujours aussi actif. Ajoutez l'énorme difficulté qu'auraient les écologistes, comme Nicolat Hulot, à associer soudain nucléaire - absence de radioactivité - absence de pollution. Un véritable virage à 180°, difficilement envisageable à échelle de quelques mois. Les équipes entourant les candidats aux présidentielles doivent être assez pauvres en scientifiques, lesquels en règle générale ont peu de goût pour la politique. D'autre part ceux qui militent ne sont probablement des scientifiques de pointe, à même de saisir l'importance des enjeux.
Le dénominateur commun à toutes ces attitudes et le fait de se dire " ce que je ne comprends pas, ce sur quoi je n'ai pas de prise immédiate, ce qui serait le signe de mon infériorité scientifique, technologique et stratégique n'a probablement que peu de chance de présenter un intérêt quelconque".
C'est humain.
En composant ce texte je jette une dernière bouteille à la mer, sans trop y croire. J'aurais au moins ... la conscience tranquille, mais je ne crois pas une seule seconde à l'efficacité de ma démarche, bien que, comme l'avais jadis dit Guillaume d'Orange :
Il est pas nécessaure d'espérer pour entreprendre

Polonium-210

Une amie journaliste me communique un texte en anglais dont les révélations sont toujours à reprendre. En marge de l’affaire Litvinenko, il rappelle les expérimentations américaines sur le polonium 210, en particulier celle de 1944 à l’université de Rochester (New York) où l’on en injecta à 4 personnes et l’on en fit avaler à un cinquième cobaye. Un des patients succomba à un cancer au bout de six jours. Les autres… mirent simplement un peu plus longtemps à mourir.
Voir William Moss et Roger Eckhardt, "The Human Plutonium Injection Experiments" , Los Alamos Science n° 23, 1995, repris à cette adresse (format pdf) :
http://www.fas.org/sgp/othergov/doe/lanl/pubs/00326640.pdf
Une phrase me revient en tête, captée au vol à la terrasse d’un bistrot de Montpellier où un professeur que je pense d’université discutait avec quelques étudiants : « Les USA sont le seul pays qui est passé directement de la barbarie à la décadence sans passer par la civilisation. » J’ajouterais volontiers Rome dans cette catégorie d’exception, le maintien de la civilisation hellénistique dans le cadre impérial faisant illusion.

Féminismes et autres questions (1)

Un(e) correspondant(e) m’a aiguillé sur le blog de Jean Gabard, auteur d’un ouvrage que je n’ai pas encore lu mais dont le titre et la présentation m’intéressent : Le féminisme et ses dérives : Du mâle dominant au père contesté, Les Editions de Paris, mai 2006. http://www.jeangabard.com/Accueil.html http://blogdejeangabard.hautetfort.com/
Voici de qu’il écrit dans son blog :
« Mon livre analyse l’évolution d’une pensée « féministe » (« féministe » dans la mesure où elle s’oppose radicalement à l’idéologie de la société patriarcale traditionnelle, autoritaire et machiste). Cette vision du monde « féministe » a permis d’accéder à une démocratie en favorisant la liberté et l’égalité en droits des hommes et des femmes. Cette démocratie n’est pas parfaite et la lutte contre le machisme est encore plus que nécessaire. Cependant, cette vision du monde « féministe » a tendance à devenir, chez des hommes et des femmes, une idéologie qui dérive…
Dans mon ouvrage j’ai essayé de dévoiler ces dérives en cherchant leurs origines et en montrant les conséquences de celles-ci dans notre vie de tous les jours et particulièrement dans l’éducation des enfants. Ainsi mon livre aborde les questions de la famille, de l’école, des cités, la crise de l’autorité, de la citoyenneté, la montée de l’intégrisme, du machisme, de l’extrême droite…
Traiter de tels sujets est encore une tâche délicate, alors que des plaies ne sont pas cicatrisées (et peut-être même encore régulièrement ouvertes). Faut-il, pour autant, parce que le machisme est encore trop présent, ne pas essayer de limiter des dérives « féministes » qui risquent d’alimenter, chez certaines personnes fragilisées, la tentation du retour en arrière ? Est-il inconvenant de croire qu’après la crise de société que nous traversons et que l’on peut assimiler à une crise d’adolescence, les hommes et les femmes puissent aller de l’avant et avoir le projet de cheminer ensemble vers un monde plus adulte ? (…)
Après avoir retracé l’évolution de la paternité, je montre comment, aujourd’hui, les limites sont posées à des enfants et comment on assiste à l’effacement des pères, à un refus de l’autorité, à une perte de repères. Les conséquences pour les enfants dans la famille, et à l’école, sont abordées et le débat peut ensuite s’engager sur la place que peut trouver la fonction du « père » dans une société qui respecte les droits des hommes et des femmes et qui cherche à devenir adulte. »

Il y a là comme un mélange (d)étonnant de choses justes et d’erreurs historiques. La démocratie n’a pas attendu le mouvement féministe ni dans l’antiquité athénienne ni dans les trois derniers siècles en Amérique puis en Europe. Disons plutôt que les femmes de notre temps ont réussi où Lysistrata avait échoué, à se faire une place d’ailleurs encore contestée dans le cadre démocratique. Je n’aime pas la politique menée par Condoleeza Rice mais qu’une femme noire accède au poste de Secrétaire d’Etat (ministre des affaires étrangères) aux USA, même s’il s’agit de la seconde femme (la première étant Madeleine Albright) et de la seconde black (le premier étant Colin Powell), témoigne d’une évolution sociétale qui n’était pas gagnée d’avance. Cela dit, opposer la démocratie « féministe » et « la société patriarcale traditionnelle, autoritaire et machiste », c’est un peu court, jeune homme ! comme aurait dit Cyrano… On a connu dans le passé le plus traditionnel des sociétés non démocratiques où les femmes avaient toute leur place. Par exemple les royaumes celtiques d’Irlande et de Grande Bretagne où c’est tout de même une reine, Boudicca, qui tint tête le plus longtemps à l’invasion romaine. Par exemple la Phénicie dont un dernier sursaut fut le combat contre Rome (encore) de la reine Zénobie de Palmyre. Et n’oublions pas le moyen âge classique. Ni, entre antiquité tardive et moyen âge, l’épopée de la Kahina dans les Aurès contre l’invasion arabe. Le machisme, c’est surtout de la démocratique Rome qu’il nous est parvenu, sans parler de l’islam qui a détruit le statut de la femme en Arabie puis dans toutes les terres soumises par la conquête et qui s’acharne à le détruire en Afrique aujourd’hui.
Mais où je rejoins Jean Gabard, c’est sur la dérive du mouvement féministe et la tendance à « l’effacement des pères, à un refus de l’autorité, à une perte de repères » dans l’éducation des enfants. J’ai été frappée du côté bien gentil, bien propre, presque nunuche de nombre de jeunes gens même lorsqu’ils portent l’uniforme adolescent des banlieues. Quelque chose d’incertain, de flou, chez la plupart. D’autres compensent par la rigidité idéologique ou la violence surtout lorsque un choc culturel s’ajoute à l’effacement du père, de sa valorisation du moins, ce qui permet à tous les manipulateurs (qu’ils soient imams, politiques, mafieux ou le tout à la fois) de prendre la place d’autorité restée vacante. La dérive idéologique féministe que constate Gabard et sur laquelle j’ai moi-même ironisé déjà sur ce blog a pour corollaire la dérive machiste des cités que l’on peut aussi comprendre comme une réaction de défense.

Si l’on survole la diversité des cultures humaines dans le temps et dans l’espace, on s’aperçoit que la sexualisation des fonctions sociales diffère beaucoup de l’une à l’autre, ce qui signifie que rien n’est inscrit dans les gènes ou la biologie, que rien n’est « naturel » sinon le fait indépassable que l’enfant mûrit 9 mois dans le ventre de la femme. On peut sans doute réaliser la fécondation in vitro mais il faut toujours implanter l’embryon dans l’utérus de la mère pour qu’il vive[1]. Tout le reste et je dis bien tout ce qui ne dérive pas directement de la grossesse et de l’allaitement est question de culture, de tradition locale, de règles de vie sociales. Pour certains peuples, la femme ne doit pas labourer car la pénétration du soc de la charrue dans la terre est symboliquement assimilé à la pénétration sexuelle ; pour d’autres, ce sont les femmes qui s’occupent entièrement des champs, du labour à la récolte. Certaines cultures pratiquent la séparation des sexes et cela peut aller jusqu’à parler une langue différente ; d’autres ne voient pas d’obstacle au côtoiement. Il existe des cultures qu’on peut qualifier de matriarcales en particulier chez les Hopis et les Navajos. Il est d’ailleurs notable que le féminisme en Amérique du Nord tende à rejoindre l’organisation sociale matrilinéaire et matrilocale de ces Amérindiens sédentaires et agriculteurs, comme si vivre sur le même sol suscitait un transfert de mémoire profonde.
Dans notre vieille Europe, comme disait l’autre, et même partiellement dans celle qu’il traitait de nouvelle en oubliant l’histoire en deçà du dernier siècle, on a vu l’alternance de périodes d’égalité des sexes et de périodes machistes, comme si l’équilibre ne pouvait s’établir, ce qui révèle à mes yeux un choc culturel, un conflit de mémoires collectives non résolu comme je l’avais esquissé en parlant des robes et des pantalons. En effet, l’univers celtique et, au moins partiellement, l’univers germano-scandinave sont des cultures assez égalitaires quant aux sexes, bien que formées de classes ou de castes[2] hiérarchisées, tandis que la loi romaine si démocratique d’apparence hiérarchise la famille et place le père en position de monarque absolu ou, plus exactement de propriétaire auquel appartiennent femme, enfants, esclaves, bétail et chiens de chasse pratiquement sur le même plan. Et la révolution française, si sourcilleuse en matière de « droits de l’homme », a fini par engendrer le machisme très romain du code Napoléon – sans oublier que c’est alors que la Franc Maçonnerie a fermé les Loges dites d’adoption, c'est-à-dire les Loges féminines. Qu’on aime ou pas les frères trois points, le fait est tout de même significatif[3]. Auparavant, le machisme s’était répandu à la faveur de la grande peste et des guerres de succession française, c'est-à-dire au moment où Philippe V a inventé la loi salique[4] pour écarter du trône sa nièce Jeanne et se saisir lui-même de la couronne, ce que n’ont pas admis les descendants de sa sœur Isabelle.

(à suivre)

[1] Je pourrais dériver sur les mères porteuses mais ça m’entraînerait trop loin de mon propos du jour.
[2] Aucun de ces termes ne me satisfait. Classe renvoie à la théorie marxiste et, au minimum, au primat explicatif de l’économie, ce que je ne cesse de contester ; mais caste est trop rigide puisqu’il a toujours existé des ascenseurs sociaux (et leur corollaire pour la descente) ; peut-on parler de caste ouverte ?
[3] J’ai traité de la Maçonnerie dans « De mots, d’outils et d’obédiences » et « De pentes, de parole et de liberté », voir les archives de ce blog. Je n’y reviens pas.
[4] Le fait fut reconnu explicitement par Henri III devant les Etats généraux lors d’une autre guerre de succession adossée à la guerre de religions.

Monday, December 18, 2006

La loi et le doute (2)

J’ai parlé dans un précédent article du « retour d’un Dieu de la loi, de justice rétributive et de volonté aussi arbitraire qu’infrangible mais révélée, un Dieu qui comble le besoin de repères plus que le besoin d’amour ». Si ce retour brandi sur un mode affirmatif et qui ne tolère aucun démenti, aucun doute, bat en brèche toute la démarche interrogative de la philosophie et de la science, je trouve aussi remarquable son opposition à l’Etat de droit, à la loi telle que la disent les autorités légales du pays. On ne peut pas parler de coutume qui s’opposerait au droit écrit : la charia tout comme la loi juive ou le droit canonique chrétien s’appuient sur un corpus de textes. Ce qui se voit remis en cause, c’est la légitimité du législateur laïc, purement humain, issu des urnes de la démocratie représentative. Cela ne signifie pas non plus, sauf dans quelques cercles très minoritaires, la promotion d’un absolutisme royal, califal ou papal. Il s’agirait plutôt de confier aux représentants du peuple l’exécutif flanqué du judiciaire, les modalités d’application de la loi dans le concret, y compris la part purement réglementaire.
Ce sont deux visions antagonistes du droit écrit qui commencent à s’opposer frontalement, l’une issue d’une tradition qui s’enracine loin dans les cultures du Croissant fertile et qui remonte peut-être à la stèle d’Hammourabi, l’autre née dans les cités grecques, étrusques et finalement à Rome.
Qui doit dire le droit ? Où se place la légitimité ? Dès que l’esprit critique, interrogatif, se pose cette question, elle devient inextricable. Contrairement aux espèces animales qui portent en elles leur loi comme le révèle l’éthologie, l’humanité ne possède que très peu de comportements « précodés » et chaque enfant doit faire l’apprentissage des règles de la société dans laquelle il naît. Tout un jeu d’interdits, de transgressions et de repères orienté vers la maîtrise de soi et la liberté paradoxale qu’elle offre se met en place – idéalement pendant l’enfance et l’adolescence, parfois tout au long de la vie. Si la rigidité puritaine fait des ravages psychologiques, la règle négociable par les enfants rois, la soumission à son propre caprice éphémère est peut-être encore plus redoutable dans ses conséquences. Le dire est désormais banal. En tenir compte, un autre problème, car cela demande de la force d’âme au quotidien, sans égard aux fatigues d’adultes sollicités jusqu’au bout de leurs forces, surtout dans les familles monoparentales ou reconstituées. Mais le plus dévastateur, ce dont on constate partout les effets en période de migration des peuples, que ce soit au travers des documents du passé ou des faits divers du présent, c’est sans doute le conflit de règles qu’entraîne le choc culturel.
Toute société s’appuie sur un droit explicite – dit ou écrit – qui se transmet par la parole et le comportement des adultes, mais aussi sur un droit implicite, une coutume tellement coutumière qu’elle va de soi et que, au sein d’un groupe, ce sera la dernière que l’on transgressera. Cette coutume joue dans les gestes quotidien, concrets, identitaires sans qu’on y pense : le samovar russe ou la théière anglaise ! Comment se placer dans le métro tant que restent des places assises, qui salue qui le premier, qui cède la place à qui, qui tient la porte à qui, qui marche à l’ombre et qui au soleil… La chanson de Renaud a fait se tordre de rire tous les habitants du sud pour qui le côté ombreux de la rue est le côté enviable. Mais cette coutume confondue souvent avec le droit naturel entraîne toute une cascade de conséquences dans l’art de distribuer l’espace, donc de bâtir ; dans l’art de distribuer le temps, horaires de travail et de repos ; sans parler des objets mais eux peuvent tenir dans des bagages ou faire l’objet d’un commerce d’importation. Des paysans pour qui la maison de plain pied ouvre sur les cours et places communes transplantés dans des tours perdent tous leurs repères implicites. Le phénomène s’observe à toutes les périodes d’urbanisation. Et l’on n’est pas encore sortis de la rencontre entre les cultures où l’on porte la robe (toge, tunique, etc.) et celles où l’on porte le pantalon (braies, saroual, etc.). La sexualisation de ces façons de se vêtir entre le haut moyen âge et nos jours, dans une aire culturelle très localisée d’abord au nord de l’Europe puis généralisée tardivement à l’ensemble Europe (Russie comprise) et Amérique, témoigne d’un de ces chocs ravivé par la conquête romaine et qui se rejoue aujourd’hui avec les migrations arabes, levantines et africaines. Derrière ce qui peut sembler une futile question de mode vestimentaire se profile tout le rapport à l’autorité parentale, à l’autorité culturelle du pays d’accueil et à la difficulté d’en apprendre les codes implicites, tout le rapport au corps de soi-même et de l’autre. Ce n’est pas si négligeable quand on voit se multiplier les viols d’adolescentes, quand des filles sont brûlées vives comme autrefois les sorcières ou les hérétiques, quand c’est tout l’éros des garçons qui ne trouve plus ni limites ni repères.
(à suivre)

Thursday, December 14, 2006

Z machine et élections

Reçu ce jour de David Ginnas :

Bonjour aux signataires de la pétition
Un nouveau forum consacré à la z//machine vient d'ouvrir ses portes, disponible depuis l'adresse suivante : http://la-revolution-mondiale.info/forumecologie (ou depuis l-r-m.info, plus bas en colonne de droite)Il est envisagé de créer un projet international, pour lequel vous êtes tous invités à proposer vos idées, répondre/améliorer celles des autres, ou simplement contribuer à l'évolution de la structure des sections elle-mêmes.Un point spécifique de ce forum est que les personnes constamment désagréables seront directement bannies, sans aucun avertissement (avec effacement des messages si nécessaire). Nous avons assez subi de nombreux pollueurs sur d'autres forums tel que celui d'Agoravox, inutile qu'il s'en prennent à coeur joie sur un forum supplémentaire.Il s'agit donc d'un forum réunissant des personnes ayant un espoir de faire bouger les choses ensemble, en fournissant leurs idées. Les présidentielles de France sont à cette occasion un opportunité qu'il serait utile de saisir, en s'y préparant dès maintenant. Des premières idées sont déjà fournies, à vous de critiquer celles-ci, d'analyser et d'enrichir le débat.Parmi les 200 signataires actuels, l'administrateur du forum espère réunir une grande majorité d'entre vous, afin de créer une première base solide de participation, d'idées, de propositions. L'inscription au forum est instantanée, et vous permet de consulter/participer aux discussions immédiatement (nul besoin de confirmation intermédiaire par votre boite e-mail).En espérant que vous répondrez tous à ce premier appel, indispensable pour créer une première communauté "d'eco-citoyens" et inciter d'autres à nous rejoindre...David Ginnaswebmaster@z//machine.net

Je venais de mettre un message sur ce thème dans mon propre forum où j'attends tousjours mes lecteurs fidèles.

Wednesday, December 06, 2006

Le forum nouveau est arrivé

Avant toute chose, je vous annonce la création d’un forum en lien avec ce blog, forum dont voici l’adresse :
http://reflexions-temps-courants.esystems.fr/

Merci de venir y poster vos réflexions.

Pour ceux qui s'étaient inscrits ces derniers jours : l'hébergeur a changé pour des raisons d'accessibilité.

Dernière heure : vu son peu de succès, ce forum a été supprimé.